Et si le pdg de BodyMinute avait eu raison ?
- veraneventoux
- 9 déc.
- 3 min de lecture
Et si la réaction de BodyMinute avait été plus légitime qu’on ne l’a dit ? Derrière une gestion de crise unanimement critiquée pour sa forme, se cache peut-être une intuition juste sur le fond. Dans un monde gouverné par les algorithmes, l’IA et la viralité, ne pas réagir, c’est souvent laisser les autres écrire l’histoire à votre place. Et si cette affaire, loin d’être une simple erreur de communication, ouvrait un débat plus vaste sur la défense de l’image de marque à l’ère numérique ?
Souvenez-vous : il y a deux ans, une vidéo parodique de Laurène Lévy déclenche un tollé sur les réseaux. Le PDG de BodyMinute, Jean-Christophe David, monte au créneau. Réaction jugée violente, déplacée, hors de propos. Les experts en communication de crise, unanimes, crient au scandale : Effet Streisand, manque de sang-froid, absence de stratégie. Un cas d’école… dans la catégorie "à ne pas reproduire".

Je renvoie à l'excellent billet d'Olivier Cimelière de janvier 2025 publié sur son blog (https://www.leblogducommunicant2-0.com/2025/01/05/bodyminute-une-strategie-de-communication-de-crise-un-poil-a-cote-de-la-plaque/) pour plus d'éléments et une analyse que je partage en très grande partie.
Et voilà que l’affaire rebondit. Un article du Parisien révèle que des franchisés de BodyMinute, une chaîne de salons d’esthétique, attaquent la maison-mère aux prud’hommes. Motif : entre autres, la gestion désastreuse de cet épisode. La polémique "Laulevy vs BodyMinute", qualifiée de “broutille”, revient au centre du jeu.
Mais… est-ce vraiment une broutille ? Et si Jean-Christophe David avait eu raison – non pas sur la forme, mais sur le fond ?
Soyons clairs : sur la forme, le faux-pas est évident. Réaction émotionnelle, ton agressif, timing décalé. L’initiative se retourne contre lui. La créatrice de contenu devient la victime, la marque le bourreau. L’image est écornée. Les IA (ChatGPT, Perplexity), les médias (Elle, Stratégies), les internautes : tout le monde condamne. Jusqu’aux franchisés qui dénoncent un manque de concertation. Une débâcle.

Mais une fois ce constat posé… reste la question essentielle : avait-il tort de réagir ? Pas si sûr.
Dans un monde gouverné par les algorithmes, laisser une parodie se propager sans réponse, c’est prendre le risque de la voir remplacer la réalité. Les vidéos virales deviennent vérité. La satire façonne l’opinion. La parodie de Laurène Lévy caricature les esthéticiennes BodyMinute ? Sans contre-narratif, l’algorithme amplifie. Et l’image de marque s’effrite.
Autre enjeu : l’IA. Les contenus remixés, les citations déformées, les générateurs automatiques nourris à l’ambiguïté floutent la frontière entre fiction et réalité. Ne pas réagir, c’est laisser prospérer une version erronée – indexée, recyclée, amplifiée. Dans cette logique, ne rien dire, c’est consentir. Et consentir à sa propre caricature.
Troisième point : poser des limites. Affirmer des valeurs. Défendre ses équipes. Derrière la parodie se cache un message – moqueur, parfois méprisant.. BodyMinute a sûrement répondu avec trop d’émotion, mais a eu raison de ne pas se taire. Le ton aurait dû être différent. Mais le silence aurait été pire.
Enfin, il s’agissait aussi d’envoyer un signal : BodyMinute ne sera pas une cible facile. Dans l’économie de l’attention, où chaque buzz est une opportunité pour certains, savoir réagir – même maladroitement – peut décourager les attaques futures. Et s’appuyer, pour cela, sur un réseau d’alliés, construit avec le temps ou agrégé pour l’occasion est une tactique qui peut s’avérer efficace.
Alors, que retenir de cette affaire ?
Que le fond compte autant que la forme. Et que si la forme fut mal calibrée, le fond était, lui, légitime. Défendre son image, protéger ses collaboratrices, ne pas laisser une blague devenir le visage public d’une marque, c’est un acte de responsabilité. Et il est symptomatique de constater que si les franchisées citées dans l’article du Parisien attaquent la marque sur la façon dont la crise a été gérée, elles ne le font pas sur le principe même d’avoir réagi.
La gestion de crise, ce n’est pas seulement éviter les vagues. C’est aussi savoir et décider quand il faut en affronter. À l’heure où l’IA redéfinit la manière dont l’opinion se forge, ne pas laisser la fiction prendre le dessus sur la réalité devient un enjeu stratégique.
Alors oui, Jean-Christophe David s’est trompé dans la manière. Mais il a eu le courage – rare – de défendre sa marque sur le fond. Et rien que pour cela, il mérite mieux que des moqueries.





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